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Le blog de Dawn Girl
16 mai 2021

Torpeur

loto

 

Quand j'ai quitté mon CDI fin octobre, j'ai d'abord été très triste. Triste d'être partie avec si peu de cérémonie. Triste de m'être acharnée, d'avoir fait des heures sup et d'avoir refusé que mon médecin m'arrête, tout ça pour obtenir zéro gratitude en retour. Triste de constater que tout le monde continuait sa petite vie bien tranquillou (je n'ai même pas eu droit à un SMS pour mon anniversaire donc inutile de dire que si je crève ce sera dans l'indifférence générale), et que tout ce que j'avais fait pendant 4 ans pour ce cabinet avait eu le même résultat que celui de pisser dans un violon.

Triste de constater qu'une fois encore, dans le milieu professionnel on est considéré comme moins que rien tellement il y en a qui attendent derrière la porte. Même pour se faire traiter comme de la merde. Même pour venir bosser à la carte et s'asseoir sur sa vie privée. Elles sont des dizaines prêtes à mettre un mouchoir sur leur amour-propre, du moment que ça rembourse le crédit de leur maison. C'est de bonne guerre, je ne leur en veux pas.

Et puis je me suis sentie libre. J'en ai profité pour buller, pour savourer ces journées où Alice était à l'école, Benoit au boulot et moi tranquille chez moi à regarder "Ca peut vous arriver". Je ne me suis même pas inscrite à Pôle Emploi ; j'ai vécu pendant 3 mois sur ma prime de départ. J'étais bien comme ça.

Et puis je suis entrée dans un cercle vicieux : plus on a de temps libre, plus on a l'impression d'en manquer. Je n'ai plus rien fait du tout. J'ai commencé à me sentir fatiguée, à avoir des maux de dos, des maux de ventre. Ma peur de mourir est revenue plus forte que jamais (bon, le fait qu'on ait diagnostiqué au mari de ma cousine, âgé de 43 ans seulement un cancer du côlon métastasé stade IV n'a pas dû aider non plus). J'étais déjà accro à mon téléphone, mais là je suis entrée dans une phase réellement pathologique, où je ne pouvais plus m'en passer. Dès que je m'asseyais sur mon canapé, hop le téléphone était dans ma main. Même si je n'avais aucun mail non lu. Même si je n'avais aucune notification Instagram. C'était comme une drogue. Peu importe que mon mec ou Alice se trouvaient dans la même pièce que moi ; je passais tellement de temps sur mon téléphone que j'en ai développé une fatigue des yeux, une fatigue tout court et même des nausées. Pendant presque deux mois, je n'ai lu aucun livre. Il y en avait un posé sur la table de mon salon mais je n'arrivais pas à aller au-delà de la page 27. J'avais la flemme de lire.

 (je parle au passé mais je suis loin d'en être sortie...)

 Bref, j'ai plongé dans les ténèbres. Et quand on est dedans c'est dur d'en sortir. Dur de s'inscrire à Pôle Emploi. Dur de passer outre son syndrome de l'imposteur. Dur d'arrêter de se dire qu'il y aura toujours plus mince, plus souriante, moins fatiguée, moins autiste que moi pour se faire embaucher quelque part. Dur d'oublier ma terreur de recommencer un boulot inconnu dans un endroit inconnu. Dur de me dire que plus le temps passe, plus un recruteur va se demander pourquoi je n'ai pas bossé depuis 6 mois (oh bah rien monsieur, j'avais juste pas envie de travailler ^^). Ce n'est pas de la mauvaise volonté, mais juste une monumentale grosse flemme de sortir de mon cocon pour aller affronter le monde extérieur. Un état de torpeur ou de sidération, je ne sais pas trop.

Et puis un matin, quelque chose m'a fortement contrariée (j'en reparlerai ultérieurement, mais pas tout de suite). Je venais de déposer Alice à l'école et je me suis dit que ce n'était plus possible, que j'allais crever si je continuais comme ça. Alors je suis allée sur le site de Pôle Emploi et j'ai postulé à quatre annonces. Quelques jours plus tard, je me suis connectée et j'ai vu cette mention sur l'une de mes candidatures :

 

non retenu

Comme ça, BIM sans aucune explication. J'ai trouvé ça d'une violence... ^^ Mais sérieusement... Tu te crèves le cul à refaire un joli CV, une belle photo, et on te balance dans la gueule ce dessin rouge avec une croix. Du coup je n'ai pas envie de me reconnecter pour voir le "résultat" des autres candidatures ; de toute façon si les recruteurs sont intéressés ils ont mon numéro de téléphone.

Il y a un autre truc qui fait mal aussi : sur certaines annonces du site Indeed, il y a une mention "nombre élevé de candidats". Je ne sais pas trop à quoi sert cette mention : dissuader / voir qui postule malgré tout pour voir la motivation des gens ? Je suis perplexe. En effet, comment ne pas perdre espoir quand on voit que 34 personnes postulent pour un CDD de 3 mois ?

J'ai trouvé deux articles assez intéressants, qui disent en substance "pourquoi ne faut-il pas postuler à des annonces ?", et j'ai trouvé certains arguments très pertinents :

1- quelquefois, il est déjà trop tard quand on voit l'annonce. On peut arriver au bon moment, mais en tout cas on est jamais en avance.

2- répondre à des annonces est déprimant. Je cite une phrase de l'article que j'ai beaucoup aimée : "postuler à des annonces c'est comme être invité à des soirées où l'hôte invite 100 personnes et en laisse 95 dehors sous la pluie".

3- c'est un exercice d'une violence énorme car on se prend des murs de silence de plein fouet, et à chaque mur, la confiance en soi et l'énergie diminuent. Cette perte de confiance finit par se voir physiquement ; le recruteur a encore moins envie de nous recruter, ce qui accentue la perte de confiance. Cercle vicieux.

4- c'est une loterie. Les recruteurs sont débordés et on est quinze mille à postuler. Un peu comme dans un concours. Je me souviendrai toujours de cette fois où je me suis retrouvée dans une salle d'attente avec deux autres candidates ; un quart d'heure plus tard deux autres sont arrivées... Un vrai défilé de viande fraîche. J'avais exactement le profil et l'expérience pour le poste ; je m'y voyais déjà mais je n'ai pas été prise, et je l'ai très mal vécu.

5- on se retrouve en concurrence directe avec les autres candidats, et si on n'est pas pris on en vient à les détester. Expérience vécue. ^^

6- postuler à une annonce permet d'alléger artificiellement sa conscience (putain qu'est ce que c'est vrai, ça...)

En conclusion : je vais bien sûr continuer à postuler à des annonces, mais je ne dois pas me cantonner à ça. Je vais aussi envoyer des candidatures spontanées (bon il ne faut pas se leurrer hein, le spontané ça finit 90 % du temps à la poubelle, mais mon premier poste d'assistante dentaire je l'avais trouvé comme ça donc ça peut marcher). Après ils me font marrer avec leurs "tablez sur le réseautage" ; ils croient sérieusement qu'on a tous des relations ? Je ne connais personne mec, je suis Asperger en plus donc asociale. Donc mes réseaux, comment te dire... ^^

 

En résumé c'est la merde.

 

 

 

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Commentaires
Z
Oui c'est vraiment très violent... j'ai aussi connu pas mal d'échecs du côté professionnel comme tu t'en rappelles peut-être et vraiment c'est quelque chose que je ne souhaite pas du tout revivre ou alors le moins possible. <br /> <br /> Après tu as malgré tout du réseau même si tu n'y penses pas forcément, tu peux essayer d'établir une liste, peut-être qu'un contact émergera. J'espère que tu vas aller mieux et sortir de cette dépendance au smartphone.
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