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Le blog de Dawn Girl

24 avril 2022

Je le savais 😁

Dans mon post du 1er juin dernier, je vous parlais de Jacinthe, la fleuriste de ma commune qui est une star locale, qui est la commerçante chez qui TOUT LE MONDE achète ses fleurs, mais que je boycotte à cause de son attitude avec moi et de son mari qui m'a mal parlé (je vous invite à relire l'article si besoin, je ne vais pas le paraphraser ici).

Et bien, un évènement récent m'a montré que j'avais raison de ne pas aimer cette harpie avec ses faux sourires. Il se trouve qu'une famille de réfugiés ukrainiens a été accueillie dans ma commune (deux soeurs et les deux petits garçons de l'une d'entre elles ; l'un des enfants est d'ailleurs dans l'école d'Alice). Un militaire retraité a pris cette famille sous son aile pour les aider à trouver un logement, une voiture et un travail. Un article relate ses démarches ; et raconte notamment qu'ils se sont rendus chez Jacinthe pour savoir si elle était en mesure de faire travailler la jeune Ukrainienne. Je vous laisse découvrir sa réponse :



Et PAF dans ta gueule... Ça m'a trop choquée. Quelle connasse sérieusement... Il y a une façon de dire les choses. Cela me conforte encore plus dans l'idée de boycotter son magasin. Elle doit être la première à dévaliser le rayon huile de tournesol pour faire des stocks. Beurk.

Le pire c'est qu'elle a eu le culot de poser en photo avec la jeune Ukrainienne pour illustrer l'article... LOL

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3 avril 2022

Le ciel t'aidera

baby shark

A l'heure où j'écris ces lignes, nous sommes le 27 mars 2022. Il faisait beau cet après-midi, alors j'ai proposé à Alice de dessiner à la craie devant notre maison (nous sommes confinées pour cause de Covid). Je n'aime pas dessiner (j'ai même horreur de ça, je suis incapable de dessiner quoi que ce soit ; je l'ai déjà évoqué ici lors de mon coming-out autistique), mais malgré cela, depuis un moment j'avais envie de dessiner Baby Shark devant ma maison. Pourquoi ? Parce qu'il y a deux ans presque jour pour jour j'étais également confinée ; j'étais assise sur les marches devant ma porte d'entrée, il faisait une chaleur à crever, j'avais la chanson de Baby Shark dans la tête et je pensais à Myriam jusqu'à en devenir folle. Et je crois qu'aujourd'hui, j'ai eu besoin de faire ressortir tout cela en le dessinant.

Le premier confinement, en mars-avril 2020, a été une période bizarre pour tout le monde. Inédite. Exceptionnelle. Pour la première fois de notre vie (et espérons-le, la dernière), nous avons été assignés à résidence. Obligés d'avoir une raison valable pour sortir. Obligés de remplir une attestation. Obligés d'avoir notre carte d'identité sur nous en permanence. Obligés de se limiter à 1 kilomètre de distance et à une heure de temps quand on voulait aller se promener. Personnellement j'ai tout respecté à la lettre. Je ne suis jamais allée à plus d'un kilomètre de mon domicile et jamais plus d'une heure. J'ai toujours rempli scrupuleusement mon attestation. J'ai toujours eu ma carte d'identité sur moi. J'ai toujours été un bon petit soldat.

J'imaginais des voitures de flics patrouiller près de chez moi, à la recherche d'un délinquant qui sortirait s'aérer trop longtemps. J'imaginais les rues de Rennes complètement vides malgré la chaleur écrasante. J'imaginais le contraste schizophrénique entre le silence des villes et l'effervescence des hôpitaux, avec des médecins et des infirmiers courant partout au rythme des bips résonnant tous azimuts dans les couloirs. J'imaginais ce virus de merde en train de circuler partout et je me demandais s'il allait m'épargner. Je me demandais quels seraient ses effets sur moi : légers, ou avec le package réanimation ? Et dans cette hypothèse, est ce qu'il resterait encore de l'oxygène pour moi ? J'avais vraiment peur.

Avec le recul, je suis sûre qu'il n'y avait aucune voiture de flics dans ma commune, pour la simple et bonne raison que je vis dans une commune de 3000 habitants où les flics ne viennent jamais. J'aurais pu sortir plus loin et plus longtemps sans me prendre une amende ni me faire contaminer. J'aurais même pu aller au bord de la mer comme certains l'ont fait. Ce n'est pas grave ; j'ai découvert des coins de ma commune que je ne connaissais pas, ce qui n'a fait que confirmer à quel point je la kiffe. J'ai bouffé du « Thomas le petit train » et du «Vintage mecanic» pendant deux mois, j'ai fait des œuvres d'art en perles à repasser, et j'ai pensé à Myriam, plus que jamais. Je pensais à elle tout le temps.

Je vous ai parlé d'elle en 2019 (voir article). Je ne me suis pas appesantie sur le sujet depuis ; de toute façon il n'y a pas grand-chose à raconter si ce n'est que rien n'a changé de mon côté : je suis toujours folle d'elle. Pour la première fois de ma vie, je ne me suis pas lassée. La flamme est toujours là, bien vivante et elle ne demande qu'à être attisée davantage. Bien entendu, Myriam n'en sait rien et n'en saura jamais rien. Pas question de perturber sa vie, et par-dessus tout, pas question de perdre le peu d'elle que je glane tous les jours, même si ce ne sont que des miettes.

Je pense que le nœud du problème, c'est que je suis obligée de la voir tous les matins (paradoxe bonjour). Si je ne la voyais plus ce serait plus facile : loin des yeux loin du cœur et basta. Mais je n'ai pas le choix : même si elle n'est pas la maîtresse d'Alice elle travaille quand même à l'école. Tous les matins elle est là, fidèle au poste. Tous les matins elle demande à Alice où elle mange le midi, et tous les matins Alice lui répond d'un air blasé qu'elle mange à la cantine. Il y a trois semaines, elle s'est approchée de moi en tendant une main (elle est tactile avec tout le monde ; je me suis déjà fait la réflexion qu'elle avait tendance à tripoter les gens). Bref elle a donc tendu une main, et d'un geste purement spontané, j'ai attrapé le haut de ses doigts et j'ai caressé l'un d'eux avec mon pouce. Cela a duré une seconde ; c'était tellement fugace que je ne sais même pas si elle s'en est rendue compte (j'espère je pense que oui). J'ai très vite lâché sa main. J'ai pensé à mon paternel qui m'a dit un jour, en me parlant d'un mec du collège sur lequel j'étais bloquée depuis des années : « Alors ça y est, vous vous êtes serré la main ? » J'ai ri jaune. Je pense que le majeur droit de Myriam restera la seule partie de son corps que je caresserai jamais, et cela me rend très malheureuse.

Je pourrais (devrais?) sauter dans le vide et lui avouer ce que je ressens, qu'on en finisse. Peut-être qu'elle n'a personne dans sa vie, peut-être qu'elle ne dirait pas non, peut-être qu'elle me dirait gentiment qu'elle est flattée mais pas intéressée, peut-être qu'elle tomberait de sa chaise car elle n'aurait jamais imaginé cela (en dépit du caressage de doigts), peut-être qu'elle me dirait que son cœur est déjà pris, peut-être qu'elle rougirait et qu'elle partirait en courant, peut-être que machin truc chouette bidule (avec des si, hein...) Ce qui est sûr en revanche, c'est que je serais fixée.

Le problème, c'est que la seule fois de ma vie où je me suis risquée à déclarer ma flamme à quelqu'un (Benjamin), je me suis pris une sulfateuse en retour. Alors certes, cela a été une très bonne chose au final : seule ma fierté a été blessée et il s'est avéré que je ne tenais pas tant que cela à ce garçon. Son stop m'a fait passer à autre chose ; de toute manière il ne m'a pas laissé le choix.

Mais ça m'a vaccinée. Je ne veux pas revivre ça. Je ne veux pas ENCORE me sentir honteuse de déclarer mes sentiments. Je ne veux pas ENCORE me prendre un râteau. Et surtout, je ne veux pas qu'après coup il y ait un malaise, qu'elle me fuie ou je ne sais quoi. Au moins Benjamin, il habitait à 600 bornes donc je ne l'ai jamais recroisé et je ne le recroiserai jamais, et c'est très bien comme ça. Mais Myriam, je suis condamnée à la voir quotidiennement, au mieux jusqu'à la fin de l'année scolaire et au pire jusqu'en juillet 2023. C'est très dur. Je suis fatiguée de me demander si elle partage la vie de quelqu'un. Je suis fatiguée de me demander pourquoi sa voiture n'est pas là tel matin ou tel soir. Je suis fatiguée de me demander pourquoi elle déménage, de me demander pourquoi certains soirs elle part dans telle direction et non pas dans telle autre, parce que tout cela ne me regarde pas en fait. Je suis fatiguée de me dire que ce coup de cœur est sans doute la conséquence de l'usure de mon couple avec B. (j'ai toujours des sentiments pour lui mais différents, par moments je me sens étouffer et je ne sais pas si tous les vieux couples passent par là. C'est peut-être normal). Je suis fatiguée de culpabiliser.

C'est pour cette raison que je ferme ma gueule et que j'attends que ça se passe.

Pour ceux qui me lisent depuis longtemps, je ne sais pas si vous vous rappelez mais avec B. j'ai souffert en silence aussi : je suis tombée amoureuse de lui début 2006, et on est sorti ensemble en mars 2007. Un an. Cela me paraît tellement dérisoire aujourd'hui. Au final le destin nous a donné un coup de pouce inespéré : B. est venu travailler dans l'auto-école juste à côté de mon travail, dans une autre commune que celle où nous nous sommes rencontrés. Un hasard de ouf. C'est ce hasard qui nous a permis de sortir ensemble.

Et bien quelquefois je me surprends à espérer la même chose avec Myriam. Que le destin nous donne un coup de pouce aussi. Mon histoire avec B. m'a donné envie de croire que les personnes destinées à faire un bout de chemin ensemble finissent par se retrouver malgré les obstacles. Vous allez penser que c'est une ode à la passivité, une excuse pour ne pas bouger mon cul, et vous aurez sans doute raison. Mais quand on a eu droit à un tel cadeau une fois, on espère que cela se reproduise encore une fois. C'est humain.

Il y a quelques mois, j'ai vu une émission où le témoignage d'une personne m'a rendue terriblement jalouse, même si son histoire est complètement différente de la mienne : en juillet 2019 elle était en road trip en Sicile, et elle hésitait entre retourner voir des amis dans je ne sais plus quel bled et gravir le volcan Stromboli. Elle a donc demandé au ciel de lui faire un signe pour l'aider à prendre sa décision. Ni une ni deux, le ciel lui a apporté ce signe sur un plateau, en la personne d'un vieillard sorti de nulle part, qui, avant même que Martine ouvre la bouche, lui a sorti qu'elle devait aller à Trifouillis les Oies et laisser tomber le Stromboli. Ni une ni deux, notre amie s'est donc exécutée. Et bien, croyez-le ou non, le Stromboli est entré en éruption ce jour-là et le pote avec qui elle devait l'escalader est mort. Elle l'a échappé belle.

Alors bien sûr je suis ravie qu'elle ait échappé à la mort, mais quand son interlocutrice lui dit, les yeux brillants : « comme quoi il faut savoir écouter son intuition», j'ai envie de lui répondre : « Oui enfin excuse-moi Brigitte mais là c'est plus qu'une intuition, c'est carrément un mec qui tombe du ciel et qui lui dit ce qu'elle doit faire, juste au moment où elle le souhaite en plus ! Il aurait vraiment fallu être cruche pour choisir le volcan !» Bref je suis jalouse, même si dans mon cas il ne s'agit pas de vie ou de mort. Moi aussi je veux une vieille gitane qui apparaisse entre la boulangerie et le bureau de tabac pour me dire : « Oublie-la, elle n'est pas faite pour toi. Elle a trouvé l'amour de sa vie et elle est heureuse. N'as-tu pas envie qu'elle soit heureuse ? »

Bien sûr que j'ai envie qu'elle soit heureuse, même si ce n'est pas avec moi. J'ai déjà demandé un signe au ciel, je ne l'ai jamais eu. J'ai même déjà pensé que je m'aveuglais volontairement ; que je refusais de voir. Le problème c'est je ne sais même pas ce que je suis censée voir.

L'autre jour, j'ai vu un magnifique arc-en-ciel derrière chez moi. Les couleurs étaient très marquées, et (pour la première fois je crois), je pouvais le voir en entier, jusqu'aux « pieds ». Je l'ai regardé et j'ai réitéré à voix haute mon vœu par rapport à Myriam. Quand on est paumé, on se raccroche à n'importe quoi, même à un arc-en-ciel. Même à son gâteau d'anniversaire. Même à une épluchure de clémentine. A n'importe quoi, à défaut d'avoir une apparition céleste comme Martine en Sicile.

Bref, cette année l'arrivée du printemps a fait remonter à la surface le souvenir du confinement de 2020. J'avais 36 ans, je détestais mon boulot, on était confiné, il faisait très chaud, je devais apprendre la chorégraphie de Baby Shark à Alice et j'avais envie de serrer Myriam dans mes bras. Deux ans plus tard j'ai 38 ans, j'ai quitté mon boulot, je suis confinée, j'ai dessiné Baby Shark avec Alice et j'ai toujours envie de serrer Myriam dans mes bras.

13 février 2022

Méfiez-vous de l'eau qui dort

Entre 2016 et 2020, j'ai eu un patron qui traitait ses salariées comme de la merde et ne s'en cachait pas. On ne peut pas dire qu'il nous harcelait à proprement parler, mais il nous croyait corvéables à merci et en demandait toujours plus, et ce, sur un ton méchant et méprisant. Quand je lui ai décrit mes conditions de travail, mon médecin traitant m'a dit : "Mais c'est un tyran en fait".

Dans l'association où je travaille depuis quelques semaines, mon supérieur n'est pas un tyran, mais c'est encore pire : derrière une apparence de jeune trentenaire cool et décontracté, se cache en réalité un grand manipulateur qui prend un malin plaisir à déstabiliser ses salariés et à les pousser vers la sortie. Traduction : sauve qui peut.

Quand je l'ai rencontré la première fois, je suis ressortie de l'entretien en me disant : "Il est sympa". Le poste me faisait peur, mais pas lui. Pourtant, il ne m'a pas caché qu'il y avait eu des problèmes au sein du comité ; il m'a même tout déballé : plusieurs personnes parties, trois arrêts maladie dont deux en cours de rupture conventionnelle et un aux prud'hommes ; l'intervention régulière d'un médiateur, d'une psychologue et de l'inspection du travail... Cela peut paraître énorme comme ça, mais il m'a amené ça d'une manière tellement naturelle et transparente que je me suis dit : "Il devait y avoir un loup dans la bergerie, les mauvais éléments sont partis et l'ambiance est redevenue sereine".

Je suis naïve parfois :-D

Le jour où j'ai démarré, il est resté avec moi toute la matinée (il n'avait pas le choix de toute façon), puis l'après-midi il m'a lâchée toute seule dans mon bureau en me disant qu’il avait, je cite, "autre chose à faire". La formule m'a fait tiquer, mais là encore, c'était dit sans agressivité donc j'ai laissé couler. D'ailleurs tout s'est bien très passé ensuite, à part l'ennui mortel que j'ai raconté dans un post précédent.

C'est lors de la première réunion d'équipe que le vernis à commencer à craquer (j'étais alors embauchée depuis quinze jours) : l'un de mes collègues a demandé s'il y aurait des chèques de Noël pour 2021, ce à quoi le directeur a répondu par la négative en invoquant des motifs bidons (je vous passe les détails, ce n'est pas intéressant). Voyant mes collègues se rebeller face à ce refus, il nous a sorti, toujours avec son air très tranquille, qu'en gros ici les salariés sont sur-payés alors que certains ont une "qualification nulle" (sic). J’ai failli tomber de ma chaise devant tant de suffisance. Le ton était déjà beaucoup moins sympathique, et le fait que de tels propos soient tenus avec une voix toute calme, était encore plus glaçant. 

Plus tard dans la journée, ma collègue déléguée du personnel est venue me voir en me disant qu'on annulait Secret Santa car elle ne se voyait pas offrir un cadeau à quelqu'un qui se permettait de supprimer les chèques de Noël sans raison valable, et que d'ailleurs, renseignement pris, il avait pris cette décision tout seul contrairement à ce qu'il avait prétendu en réunion.

Bref, je venais d'avoir une démonstration de mensonge et de mépris de la part de mon supérieur, ce qui le rendait déjà bien moins sympathique malgré ses sourires et son ton doucereux.

Deux jours plus tard, un atelier cuisine a eu lieu au sein de l'association. Le déroulement d'un atelier est le suivant : un cuisinier et plusieurs malades préparent un repas ; ils invitent ensuite les salariés à déjeuner. Ce jour-là, en raison d'un grand nombre d'absents, le dessert initialement prévu n'a pas pu être préparé (en l'occurrence des crèmes brûlées). Et bien qu'a fait mon supérieur ? Il est parti au supermarché d'à côté, a ramené 4 crèmes brûlées, en a donné à 3 personnes et s'est gardé la quatrième pour lui. 

Sauf qu'on était 7 personnes à table...

J'ai cru à une caméra cachée. Je l'ai regardé bouffer sa crème brûlée, droit dans ses bottes, en me disant :  "ce n'est pas possible, il va forcément dire quelque chose...", mais non, rien, pas de caméra cachée. Là encore je suis tombée de l’armoire devant un tel manque de savoir-vivre.

J'ai fait part de mon indignation à mes collègues, et là les langues se sont déliées. J'ai su qu'en fait, le malaise est présent depuis bien longtemps et que tout le monde n'attend qu'une seule chose : qu'il se barre. Qu'il a déjà mis le boxon dans l'association où il travaillait avant et qu'il est en train de recommencer ici. Que le coup des crèmes brûlées achetées au supermarché, c'est parce qu'il était mécontent qu'elles n'aient pas été préparées durant l'atelier cuisine comme c'était prévu (euh ils n'étaient que deux pour tout faire, hein... Puis merde t'es invité, c'est gratuit, donc contente-toi de ce qu'on t'offre quoi...). Que Monsieur a été vexé que les trois personnes à qui il a donné une crème brûlée ne lui aient pas dit merci (bien fait pour sa gueule). Que le jour où trois salariés ont déménagé son bureau, il a apporté un gâteau le lendemain et n'en a donné qu'à ces trois salariés et rien pour les autres. Que quand on lui demande pourquoi il y a eu autant de départs de salariés en si peu de temps, il trouve toujours une excuse : X. était trop fragile, Y. ne foutait rien, Z. a mal parlé à un bénévole... Qu'il prend des éléments personnels pour les utiliser contre les salariés (par exemple en ce moment avec un collègue qui est en instance de divorce). Qu'il ne supporte pas que les salariés mangent sans lui le midi. Qu'il ne comprend pas pourquoi il n'est pas convié lorsque deux salariés vont boire un verre ensemble le soir après le travail. Qu'il se fait rembourser la moitié de sa carte de métro par l'association, alors qu'il vient travailler en voiture. Qu'il a dépeint un tableau épouvantable des salariés auprès de l'inspecteur du travail (en gros ce sont des incompétents sur-payés qui n'ont pas les diplômes requis, et qui sont tous méchants avec lui. L'inspecteur a dit que c'était la première fois de sa carrière qu'il voyait ça)... Bref je vous passe tout le reste mais bon vous cernez un peu mieux le personnage. On est bien loin du gars sympa qui m'avait reçue en entretien au mois de novembre...

Autre élément : il a convoqué l'une de mes collègues dans son bureau suite à une petite remarque qu'elle avait faite lors de la réunion d'équipe. Il lui a dit qu'il n'avait pas apprécié son agressivité. Or, c'était vraiment une petite remarque de rien du tout, qui était tout sauf agressive... On sent le gars qui utilise un détail pour essayer de déstabiliser la personne en face de lui, et ça, je peux vous dire que ça CRAINT UN MAX. Note pour plus tard : ne jamais montrer le moindre signe de doute ou de faiblesse devant lui. Jamais.

Hélas pour lui, il y a une très bonne cohésion d'équipe (et je m'inclus dedans). Du coup tout le monde essaye de le pousser vers la sortie. Certains de mes collègues sont allés rechercher le CV sur la base duquel il a été embauché, et ils ont constaté qu'à la base il avait juste un master 1 d'anglais, donc RIEN A VOIR avec le management, les RH ou que sais-je. Il s'est formé ensuite et c'est très bien, mais qu'il vienne parler de "qualification nulle" alors que certains salariés sont plus diplômés que lui, ça prête à sourire. D'après l'inspecteur du travail, il y a un élément concret (autre que son attitude envers les salariés) qui relève du pénal ; un rapport a été dressé fin janvier. Mes collègues espèrent que ce rapport conduira à son départ. A titre personnel je n'ai pas (encore) eu de souci avec lui et je n'ai pas vocation à rester ici, mais quand même, ça pue du cul.

Edit : une deuxième ancienne salariée attaque le directeur aux prud'hommes... On a appris de source sûre qu'il commence à sentir le vent du boulet et à chercher du boulot ailleurs. Dommage, je ne serai plus là pour sabrer le champagne avec mes collègues quand il partira.

(c’est la première fois de ma vie que j’ai des collègues en or qui m’ont acceptée comme je suis, et rien que pour ça je suis TRES TRES TRISTE de partir dans dix jours. Je vais pleurer ma race comme si je partais au bout de 20 ans d’ancienneté. L'un de mes collègues m'a filé sa formation Excel gratos sur une clé USB, et un autre m'a eu une place à Roland Garros 2022 pour seulement 89 euros, je suis trop contente ! :-)))))) Ils vont me manquer.)

 

 

 

 

19 janvier 2022

Origine(s)

Je suis une personne qu'on peut qualifier d' "issue d'un milieu modeste". Ma mère, qui pour rappel m'a élevée seule, était Agent des Services Hospitaliers ; autrement dit elle faisait le ménage dans les chambres d'hôpital. Mon père a fait plusieurs métiers et n'a jamais eu une seule thune de sa vie (si ma mère lisait cet article, elle ajouterait "il a surtout pris la thune des autres" ^^). Mes grands-parents étaient aisés financièrement, mais seulement parce que mon grand-père avait créé son entreprise durant les trente glorieuses ; à la base il est fils d'immigré italien donc pas vraiment né avec une cuillère en argent dans la bouche, mais comme il gagnait beaucoup d'argent, ma grand-mère faisait les boutiques et achetait à ses filles des vêtements de marque et des chaussures de luxe, y compris des trucs en (vrai) croco et en (vrai) vison. Elle possédait une collection phénoménale de poupées en porcelaine et d’objets anciens qui valaient la peau des fesses. Dépenser sans compter a été, avec la cuisine, sa principale source de plaisir jusqu’à ses vieux jours.

Bien sûr le train de vie a été bien différent une fois que j'ai vécu seule avec ma mère, soit à partir de l'âge de 7 ans : je n'ai jamais manqué de rien, mais nous vivions dans un logement social sur son seul salaire. Pas dans le luxe et les professions dites "prestigieuses". Pas avec des amis notables qui lisaient le Monde. Pas avec des proches qui parlaient de Mozart ou de Chopin à table. Le quotidien c'était surtout odeur de clope, fins de mois difficiles, hurlements au téléphone avec mon père (l’un des plus grands traumatismes de mon enfance), culpabilisation, disputes, dépression. Ma mère avait peu d'amis, pas de conjoint et elle buvait (mais ça, vous le savez déjà). La seule chose qui dénotait là-dedans, c'étaient les livres qui ornaient sa bibliothèque : Alain Decaux, Louis-Ferdinand Céline, Hervé Bazin, Agatha Christie, Romain Gary... Je suis sûre que toutes ses collègues ASH ignoraient qui était Romain Gary. Je peux comprendre le décalage qu'elle ressentait et les complexes qui en découlaient : elle ne se sentait pas à sa place. Je me suis enfermée dans ma bulle d'autiste pour avoir la paix.

Ma mère aurait aimé être une grande dame. Elle aurait aimé être Coco Chanel, Inès de la Fressange ou la Baronne de Machin-Chose. Elle a très certainement pensé qu'elle n'était pas née dans la bonne famille. Elle était la plus intelligente de sa fratrie ; elle connaissait assez bien la mythologie et a toujours lu beaucoup de livres d'histoire. Elle aurait pu faire des études, mais pour des raisons de relations difficiles avec ses parents, pour des raisons de manque de confiance en elle, pour des raisons qui n’appartiennent qu’à elle, elle a tout laissé tomber en terminale et elle s'est mise à traîner avec des mecs louches. Elle a fait un casse dans une pharmacie. Elle a testé toutes les drogues du marché : elle a fumé, sniffé, pris des pilules chelou, de la poudre bizarre, des trucs qui s'injectent en intraveineuse et j’en passe. Elle a fait la manche à Marseille. Elle a croisé la route de mon père dans un bar, ils ont emménagé au-dessus d'une boîte de nuit et je suis arrivée. C'est à ce moment-là qu'elle a arrêté ses conneries.

J'ai très mal vécu ses complexes sociaux, parce qu'elle n'en parlait pas mais que je les sentais. Elle s'achetait des fringues Dorothée Bis, des sacs à main Chanel, des lunettes de soleil Ray-Ban et puis elle pleurait parce qu'elle était à découvert (à l'époque elle gagnait 5000 francs par mois). Du coup, quand elle achetait un truc destiné à la frime, je paniquais en lui demandant le montant de son découvert. Je m'inquiétais pour elle. Or ce n'est pas normal d'être inquiète pour les finances de sa mère quand on a 9 ou 10 ans. Elle m'habillait comme une petite fille modèle avec des vêtements chers, sans s'occuper de savoir si ces vêtements étaient pratiques pour moi. J'ai un souvenir horrible de maternelle où je n'arrivais pas à enlever la combinaison dont elle m'avait affublée pour aller aux toilettes. Et ça soûlait les maîtresses de chercher comment on ouvrait ce truc (souvenez-vous comment elles étaient là-bas...). Je l'ai suppliée de ne plus m'habiller avec cette chose pour aller à l'école ; elle a cédé mais elle n'a pas compris pourquoi je pleurais. Et surtout elle a trouvé lamentable que je fasse du nez sur cette combinaison, vu le prix qu'elle avait coûté.

Un autre jour, devant l'école maternelle elle s'est exclamée : "T'as les cheveux saaaaaaales ! Comme c'est pas permis". (plus de trente ans après je me souviens encore de l'intonation exacte avec laquelle elle a prononcé cette phrase). Elle disait qu'elle avait honte de mes ongles sales, comme si à 6 ans on était responsable de sa "saleté"... Lors de mon spectacle de danse, elle s'est sentie obligée de me mettre du fond de teint sur la figure alors que personne ne lui avait rien demandé. Elle m'avait sans doute rêvée gracieuse, délicate et proprette comme une petite fille du 16ème arrondissement de Paris (ou du moins l'image qu'elle s'en faisait), alors bien sûr je n'étais pas conforme à ses rêves. J'avais l'impression de ne jamais être bien, de lui faire honte. Au-delà des violences physiques (dont je parlerai dans un prochain post pour enfin clore ma série d'articles sur la violence), la petite fille que j'étais a énormément souffert de ne pas être belle aux yeux de sa mère.

Evidemment, ma mère m'a involontairement transmis son complexe social. Depuis toute petite je rêve des beaux quartiers de Rennes. Depuis toute petite je complexe de ne pas faire partie de ce sérail qui m'est à jamais interdit. Depuis toute petite j'envie leurs Zadig et Voltaire, leur peau mate, leur langage châtié qui roule tout seul, leurs soirées mondaines, leur aisance corporelle, leur capacité à ne pas montrer leurs émotions en public et plus généralement leur prestance. Je me sens grotesque à côté d'eux, avec mes pantalons qui tombent, ma peau du ventre visible quand je me baisse et mon élocution pourrie. On n'est clairement pas du même monde.

J'ai fréquenté la fac de droit puis l'école de notariat ; dans cette dernière école, la majorité de mes camarades de classe étaient des fils de notaires qui venaient en cours en Porsche Cayenne. Les filles étaient bien apprêtées, très sûres d'elles avec leurs queues de cheval parfaites et leurs vêtements toujours impeccables. Les mecs ne me calculaient pas. L'un d'entre eux me plaisait beaucoup mais je crois qu'il ne sait même pas que j'existe. ^^ Ils savaient tous skier depuis l'enfance, partaient faire du bateau l'été avec leurs parents. Aucun d'entre eux n'avait un IMC supérieur à 23. Aucun. La majorité est devenue notaire. Moi je me suis tirée au bout d'un an, je n'avais rien à foutre là-bas. Ma mère m'en a tellement mis plein la tête que je lui ai dit que je lui rembourserais les 2500 € de frais d'inscription. En fait je lui ai dit ça pour avoir la paix, pour qu'elle arrête de m'en mettre plein la tête, mais des années plus tard elle m'en reparle encore en me disant : "Tu m'avais dit que tu me rembourserais. Alors tu me rembourseras quand je changerai de voiture". Si ma voiture à moi me lâche c'est pas grave, j'irai bosser à pied depuis ma cambrousse, hein...

Et puis il y a eu Aymeric. L'archétype du garçon des quartiers chics, avec son teint hâlé, ses cheveux longs et son pull Lacoste avec la chemise blanche en-dessous. Il était super beau et, fait notable, il était super sympa. Accessible. Je m'entendais très bien avec lui. Il m'attirait. Je pense que je lui plaisais aussi, maaaais... fucking milieu social. Les torchons et les serviettes qui se mélangent, ça n'existe que dans les films, pas dans la vraie vie. Un jour, sur son statut Facebook j'ai écrit une blague pour le faire rire, et là, son amie Apolline de Cambourg s'est méchamment moquée de moi alors que personne ne l'avait sonnée. Je l'ai envoyée bouler ; elle m'a répondu : "Susceptible ?" J'ai effacé ma blague.

(Apolline de Cambourg est devenu médecin).

En vieillissant j'apprends à accepter d'où je viens et à m'affranchir de cette classe dont je ne ferai jamais partie. (et quelque part, à m'affranchir de ma mère). Le problème, c'est qu'avec les gens plus "simples" je ne me sens pas à l'aise non plus. Il y a très longtemps, une collègue de travail qui vivait en logement social m'a appelée "l'intellectuelle". (bon c'était une connasse). J'ai également eu l'occasion de côtoyer des personnes proches du milieu agricole, et je ne me suis pas sentie à mon aise non plus ; ils me prenaient pour une intello. Pourtant je ne suis pas du genre à ma la raconter, ni à étaler ma science ni quoi que ce soit. Mais je suis toujours entre-deux eaux, jamais à ma place. 

(j'avais écrit plusieurs paragraphes pour illustrer mon propos sur une personne qui a chopé les couilles et le carnet d'adresses de son mari pour grimper socialement, mais je ne suis pas satisfaite de ces lignes donc je les supprime. Je n'ai pas envie de dire du mal des gens aujourd'hui. La maturité sans doute :-D )

Quelquefois je me dis que si j'avais bossé à la fac, j'aurais pu aller très loin. J'avais les capacités intellectuelles. Le problème, c'est qu'avec mes conditions familiales c'était tout simplement impossible d'y arriver (contrairement à ce que prétend ma mère. Elle a le culot de dire que j'avais tout pour réussir. LOL). Et maintenant c'est trop tard.

23 décembre 2021

Le sang versé de Asa Larsson

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Résumé Babelio Après un long congé maladie, l'avocate Rebecka Martinsson est de retour, en mission pour son cabinet, dans sa ville natale de Kiruna. Mais les retrouvailles sont loin d'être aussi paisibles que le suggèrent les forêts enneigées de Laponie. Une femme pasteur, dont l'engagement féministe suscitait des remous dans la communauté, est retrouvée sauvagement mutilée, pendue à l'orgue de son église. Cette exécution fait remonter en Rebecka le souvenir traumatisant d'une enquête sur le meurtre d'un autre pasteur à laquelle elle avait participé un an auparavant.
Le coupable est-il le même ? Y aura-t-il d'autres victimes ? La terre, désormais, semble prête à dévoiler le sang versé... Ce suspense implacable, somptueusement éclairé par les lumières polaires, révèle tout ce qui rend Asa Larsson incontournable : une intrigue parfaitement menée, une écriture singulière, envoûtante et une grande sensibilité psychologique.
Premier livre que j'arrive à lire en entier depuis le mois de mars (le deuxième pour le challenge des Dames en noir). Mon bilan lecture de 2021 est absolument catastrophique... J'essaierai de faire mieux l'année prochaine.
Je ne vais pas m'appesantir sur ce livre pendant des heures : j'ai été déçue. Déjà je ne suis pas fan du style littéraire de Asa Larsson qui laisse franchement à désirer, mais en plus tout le roman est construit sur la même trame façon poutres apparentes : Rebecka boit une coupette et pense à un truc du passé, Lisa sort ses chiens et pense à un truc du passé, Mimmi essuie ses verres et pense à un truc du passé... c'est redondant et lassant.
Autre chose qui m'a déplu : la présence du sempiternel simplet de service en la personne de Nalle, personnage cliché qu'on retrouve dans bon nombre de polars ou de romans à suspense. Non Asa on ne croit pas une seconde que c'est lui le tueur, car on sait que le meurtrier n'est jamais le-garçon-handicapé-qui-fait-peur. Niéé.
Autre élément plus objectif : il y a de nombreuses allusions au roman précédent, "Horreur boréale", que je n'avais pas lu... Du coup je n'ai pas tout compris et j'ai été frustrée. Je pense qu'il vaut mieux avoir lu le début de l'histoire avant de lire "Le sang versé".
Bref, peut-être est-ce moi qui suis blasée :-D Mais je n'ai vraiment pas été convaincue par ce roman. Peut-être aussi que je ne suis pas une bonne cliente pour les polars nordiques : je n'en ai pas lu beaucoup mais j'ai l'impression qu'ils se ressemblent tous. Hormis Stieg Larsson qui avait un réel talent, les écrivains du froid ne me font plus rêver. Je vais plutôt me replonger dans mes bons vieux classiques français :-)

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19 décembre 2021

Bore out

Fin octobre j'ai été gentiment "remerciée" par le laboratoire dans lequel je travaillais depuis juin, juste au moment où je commençais à bien me débrouiller dans mon travail et alors que tout se passait bien... Ils n'ont pas apprécié que je demande un CDI en faisant jouer la concurrence. "On n'embauche pas pour l'instant", m'a rétorqué la DRH (ou plutôt son associé sous-fifre qu'elle a envoyé au casse-pipe pour m'annoncer la bonne nouvelle, attendu qu'elle n'a pas eu les couilles de me le dire elle-même)...Pendant ce temps-là, deux collègues ont signé un CDI fin septembre et une autre va signer dans les jours qui viennent... Et comme en octobre j'ai eu un bulletin de salaire séparé comprenant uniquement mes indemnités de fin de contrat, j'en ai déduit qu'ils avaient l'intention de me garder, mais en CDD. Donc "on n'embauche pas pour l'instant", moi je réponds : BARBIE GROSSE MENTEUSE. Je suis aussi légitime et méritante qu'une autre pour prétendre à un CDI, donc garde tes mensonges et étouffe-toi avec, connasse.

Trois semaines après, j'ai été embauchée en intérim dans une association. Je me doutais bien que ce ne serait pas aussi intensif que dans le médical, surtout avec la charge de travail de ouf que mon ex-patron me collait sur le dos, mais je ne m'attendais quand même pas à être payée à ne rien faire... Je m'ennuie prodigieusement.

Quand le directeur de l'association m'a reçue en entretien et m'a expliqué mes missions, j'ai eu l'image d'une association avec plein de passages dans la journée et des appels téléphoniques en pagaille (surtout que l'asso en question est un très très gros machin national ultra connu). Avec ma légendaire confiance en moi (lol), j'ai eu peur de ne pas y arriver. Je me suis dit que je n'y arriverais jamais. Que jamais je n'arriverais à trouver un job qui me convienne. Que plus le temps passait, plus ce serait compliqué. Je me sentais hyper vulnérable et à fleur de peau. Comme je disais dans un post précédent, tout est beaucoup plus difficile depuis mon diagnostic, d'une part parce que je supporte de moins en moins de vivre dans une société de neurotypiques, mais aussi parce que je suis jalouse des personnes autistes qui ELLES ont réussi à obtenir ce que je n'arrive pas à obtenir : un job adapté à leur autisme, sans stress.

Bref je vous laisse imaginer l'état de chiasse intérieure dans lequel j'ai pris mon poste, hashtag larmes et mal de ventre inside.

Une fois passée l'appréhension ++ du début, je me suis très vite rendue compte que mon poste ne servait pas à grand-chose... dès le premier jour en fait. Il suffit d'analyser à froid ma fiche de poste pour voir que non seulement ma liste de tâches ne fait que sept lignes, mais qu'en plus les tâches en question prennent environ 5 minutes chacune, ce qui fait un peu léger sur une journée de 7 heures.

Résultat : je m'ennuie comme un rat mort. On me paye 1500 balles nets pour m'ennuyer dans un bureau à ne rien faire. Certains pourront penser que c'est royal, mais je vous assure que c'est l'horreur. J'avais des moments d'ennui dans mon ancien boulot et déjà je ne le vivais pas très bien, mais alors là j'ai décroché le cocotier en matière d'ennui intersidéral. Je me fais chier et j'ai honte alors que ce n'est pas ma faute. Alors je cherche des stratégies pour camoufler mon ennui (le camouflage ça me connaît, hein ^^) : poser des dossiers sur mon bureau, checker mes mails que j'ai déjà checké 5 minutes avant, écrire dans mon petit carnet (du coup je risque d'être prolifique ici ^^), bref c'est épuisant et démoralisant. Je ne comprends pas POURQUOI j'ai été embauchée. Ma fonction est inutile ici ; il suffit de ventiler mes missions entre les salariés du comité et tout sera absorbé sans problème. Surtout qu'il y a des bénévoles présents tous les jours... Je suis d'ailleurs tombée par hasard sur le mail de l'une d'entre eux, il y a quelques jours :

 

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 Alors bien sûr, c'est différent quand on est bénévole ou salarié, mais bon c'est la preuve que le directeur savait que je n'aurais pas grand monde à accueillir...

Cela dit, tout n'est pas noir non plus : j'ai des collègues super sympas (l'un d'eux m'a filé l'intégralité de sa formation Excel sur une clé USB, une vraie mine d'or pour moi, coeur sur lui pour l'éternité). J'ai aussi quelques journées plus fastes : hier par exemple j'ai accueilli à trois reprises des personnes qui venaient pour des quêtes décès ; je reçois ou j'ai régulièrement des personnes au téléphone qui sont malades / ont un proche malade et ont besoin d'en parler. Ce n'est pas facile mais c'est enrichissant humainement. Malheureusement, ce sont des contacts qui inteviennent de manière très irrégulière.

Alors vous allez me dire que je peux aller voir mes collègues et leur demander ce que je peux faire pour me rendre utile, mais les activités de l'association sont assez cloisonnées (une personne à la comptabilité, une autre à la recherche, une troisième à l'accompagnement des malades etc), et puis merde depuis quand c'est au salarié d'une entreprise d'aller quémander du boulot ? Si j'étais stagiaire encore je veux bien, mais là je suis censée avoir un rôle à jouer donc des fonctions définies nan ?

Et puis je dois dire que cette situation me vexe aussi : certes je suis autiste avec les difficultés que cela comporte, mais je sais aussi faire plein de trucs, et tout cela ne sert à rien ici. Une potiche serait plus efficace que moi. J'ai peur que mes neurones fondent à force d'être inutilisés.

En revanche, il y a du croustillant par rapport au directeur de l'association. J'ai bien envie de vous écrire un article là-dessus, mais j'ai peur que ce soit barbant. ^^ J'ai déjà trouvé le titre : "Méfiez-vous de l'eau qui dort", ou encore "le serpent caché dans la pomme". Je vais essayer de rédiger un truc et je verrai si je le jette à la poubelle ou non.

5 décembre 2021

Tattoos numéro 3 et numéro 4




(la dague a été faite en premier et le squelette en deuxième)

Si j'avais des sous, j'y retournerais tout de suite. Quand on commence on ne s'arrête plus, je confirme ! Si je mène à bien tous mes projets tattoos, ça m'en fera 9, ce qui reste quand même très raisonnable 😊


28 novembre 2021

Et si ce n'était que le début ?

J'évoquais précédemment le fait que mon diagnostic d'autisme m'avait peut-être compliqué la vie ; je suis à présent certaine d'avoir vu juste. L'auteur de la page "L'oeil atypique" sur Instagram a fait un post qui m'a (un peu) rassurée ; je vous le mets ci-dessous en version abrégée (sinon ça fait trop long). Quand je lui ai dit que j'étais paumée depuis mon diagnostic elle m'a répondu que c'était un processus, que c'était donc tout à fait normal.

 

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Ca fait un peu gros intestin mais le message est là ^^ Le diagnostic n'est pas une fin en soi, c'est la première étape d'un parcours qui ne fait que commencer.

J'ai essayé de prendre à froid une situation que je vis mal (en l'occurrence le fait de me sentir systématiquement exclue en présence de mes collègues de travail), et en réalité la situation ne s'est nullement dégradée : elle a toujours été comme ça. J'ai toujours été à part au boulot, que ce soit dans l'entreprise où je bosse actuellement ou dans les entreprises précédentes. C'est juste qu'avec mon diagnostic je vois les choses d'une manière plus lucide ; je remarque des choses que je ne n'avais pas remarquées avant.

Le fait de savoir que je suis autiste est à double tranchant, car la soif de comprendre est inextinguible, et les réponses à des questions entraînent d'autres questions : c'est un véritable tonneau des danaïdes. Or, je n'avais pas du tout envisagé les choses sous cet angle. Je pensais trouver des réponses, trouver une clé, et je me retrouve avec un trousseau gigantesque dans la main sans savoir quoi faire avec. Je suis partagée entre deux chemins radicalement différents : d'un côté la volonté de me protéger et de fuir les situations qui m'angoissent (marre du camouflage social qui m'épuise ; pourquoi les gens ne m'accepteraient pas telle que je suis etc...), et d'un autre côté l'envie de surmonter mon handicap et de continuer à acquérir des petites victoires tous les jours. Parce que je suis consciente que quoi qu'il arrive je suis née autiste et je mourrai autiste ; je devrai vivre avec ça jusqu'à ma mort. Je n'ai pas le choix. MAIS il se trouve que j'ai besoin de manger comme tout le monde, que je dois donc aller bosser comme tout le monde, et que donc je ne peux pas me payer le luxe de dire merde à tout le monde et d'aller vivre dans une grotte (c'est bien dommage mais à moins de gagner 12 millions au Loto...).

Je parlais également précédemment des "parties de ping pong" que sont les conversations entre les personnes non-autistes ; et bien récemment j'ai eu l'occasion d'assister à une partie en direct. Ce jour-là j'ai emmené Alice à l'anniversaire d'un copain, et comme trois autres enfants de la classe étaient également invités, j'ai bien été obligée d'affronter les autres parents au moment d'aller la chercher... pas le choix. Obligée de me mettre au milieu des autres, obligée de faire semblant de ne pas avoir envie de gerber de stress, et SURTOUT, obligée d'assister au numéro de popularité de l'une d'entre eux : Bénédicte.

Je fais une parenthèse sur Bénédicte ; je sais que ça coupe le récit mais la description de cette personne illustre parfaitement ce qui me handicape dans l'autisme.

Bénédicte est présidente de l'association des parents d'élèves. Bénédicte appelle toutes les maîtresses de l'école par leur prénom, y compris la directrice, en mode "je suis pote avec tout le monde et j'ai le 06 personnel de la chef". Bénédicte a tout vu, tout fait, elle connaît l'école tellement par coeur que tu pourrais croire qu'elle a participé à la contruction du bâtiment (et qu'elle est, par conséquent âgée de 172 ans). Bénédicte est tellement à l'aise avec tout le monde qu'elle s'adresse à tous les enfants avec des petits surnoms du style "mon grand" ou "ma choupinette". Bénédicte alpague tous les parents d'élèves devant le portail avec des "salut, ça va ?" tonitruants, car Bénédicte aime bien montrer qu'elle est populaire.

Je ne serais pas étonnée si j'apprenais que Bénédicte passe son temps à critiquer Pierre Paul Jacques quand elle est entourée de sa cour de prétendants.

Comme vous pouvez l'imaginer, Bénédicte et moi on ne se kiffe pas trop : contrairement aux autres je la vouvoie et je me cantonne au simple "bonjour" pour la saluer, car même si j'adore vivre à la campagne je déteste cette proximité rurale en mode "on est une grande famille tavu". J'avais d'ailleurs évoqué dans un article précédent les parents d'élèves qui se tutoient tous et se refilent leur courrier devant l'école. Je déteste ça, ça me met mal à l'aise.

Bref, Bénédicte représente à la fois ce que j'admire et ce que je déteste : d'un côté je l'envie d'être super à l'aise, de se déplacer partout comme un poisson dans l'eau et d'avoir toujours le bon mot au bon moment, et d'un autre côté elle m'exaspère avec sa grande gueule. Quand elle nous sort que "avant il y avait 7 classes dans l'école", que telle maîtresse enseignait dans telle salle et que limite elle connaît le Pape Jean-Paul II, j'ai envie de lui répliquer que mon beau-père a vécu dans la commune dans les années 40, qu'il pourrait lui décrire de mémoire où se trouvaient les vieilles échoppes autour de l'église ; que ses soeurs qui sont âgées de 90 ans à présent étaient scolarisées dans l'école de nos enfants, à l'époque où la propre grand-mère de Bénédicte n'était même pas encore dans les couilles de son père, donc poupougne la guide touristique, hein. Mais comme je suis autiste et que je n'ai aucune répartie, je ferme ma gueule même si je n'en pense pas moins.

 

FIN DE LA DIGRESSION.

Maintenant que vous visualisez mieux le personnage de Bénédicte, j'en reviens à l'anniversaire du pote d'Alice. A peine arrivée, Bénédicte s'est placée au milieu du cercle de parents, a pris sa raquette de ping pong et a entamé une partie avec Jean-Maurice, le père d'Edouard :

 

"Salut !"

Jean-Maurice : "Salut !"

Béné : "Alors Edouard il a repris le foot ?"

Jean-Maurice : "Oui avec Arthur".

Béné : "Ils sont dans la même classe ?"

Jean-Maurice : "Oui mais pas au même niveau".

Béné : "Nous on ne fait plus de sport, ça nous manque un peu. Il faudrait qu'ils reprennent les foulées grégoriennes".

Jean-Maurice : "Ah oui, c'était cool la randonnée des enfants"

Béné : "Oui enfin Zoé a eu de la pluie plein les bottes, ahaha !"

 

Etc etc... J'avais le tournis tellement les répliques fusaient de part et d'autre. C'était fascinant à regarder, vraiment. Moi je suis incapable de faire ça, sauf avec les personnes avec qui je suis naturellement à l'aise (une personne sur cinquante ??) (et même quand je discute facilement j'ai toujours l'impression de chier dans la colle avec mon élocution pourrie d'autiste).

Il y a tant d'événements auxquels j'aimerais prendre part mais qui me paraissent inaccessibles... Par exemple j'aurais adoré participer à la randonnée éco-citoyenne du village où j'habite. J'aurais adoré emmener Alice à la bénédiction des cartables juste après la rentrée scolaire. Mais j'en suis incapable. Ca me paralyse de voir tout le temps les mêmes têtes dans toutes les manifestations de parents d'élèves. Si j'avais un mec à l'aise en société cela m'aiderait ; malheureusement B. est aussi asocial que moi. Pas plus tard qu'hier soir j'ai dû lui chier un cake pour qu'il daigne m'accompagner le mois prochain pour aller chercher deux bouteilles de jus de pommes sous le préau de l'école... La seule solution serait de trouver une mère d'élève avec qui ça accroche vraiment, à qui je pourrais confier mon autisme et qui m'aiderait pour me mêler aux autres, mais à cause de mon mutisme sélectif de merde je matche à peu près tous les dix ans avec quelqu'un :-D

 

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Les deux événements locaux auxquels j'aimerais participer avant les 40 ans d'Alice, inch'Allah.

Bref, comme vous voyez mon état d'esprit n'a pas changé depuis mes derniers posts : c'est le bordel. Je ne sais pas si c'est bien ou mal de savoir que je suis autiste. Je ne sais pas si j'y verrai plus clair un jour. J'aimerais lâcher prise mais il y a des millions de câbles connectés dans mon cerveau, de toutes les tailles et de toutes les couleurs et enchevêtrés les uns dans les autres. Je vais mettre des années avant de les démêler / débrancher / rebrancher ailleurs. Je vais créer un hashtag #jesuisunreseauelectrique.

(j'ai pas fini de vous soûler avec mon Aspie, vous allez en bouffer à toutes les sauces je vous préviens ^^)

17 novembre 2021

Travaux en cours

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(je vais parler d'aménagement, de travaux et de portails, mais je vous promets que mon article n'est pas barbant (je dis aussi du mal des gens ^^)

Il y a longtemps déjà, je vous avais parlé du fait qu'après le décès de mon beau-père nous irions vivre dans sa maison, et les réticences qui allaient avec (si vous souhaitez relire l'article c'est celui du 8 janvier 2019, je n'arrive pas à mettre le lien).

J'ai toujours les mêmes réserves, mais je commence (un peu) à me projeter dans cette maison. Certains vont penser que c'est une fuite en avant ; quelquefois je me dis la même chose -j'aurai certainement l'occasion d'en reparler ici un jour. Mais bon bref, plutôt que me focaliser sur les points négatifs, j'essaye de voir le positif. Une chose m'y a aidée : depuis plusieurs mois Alice aide beaucoup son père pour aménager l'extérieur : elle a taillé des arbustes, planté des arbrisseaux, béché de la terre, étalé des taupinières... Elle est heureuse de s'investir là-bas. Par contre j'ai posé une condition sine qua non à B. pour qu'on aille y vivre un jour : qu'il clôture complètement le tour de la maison, car en l'état actuel on entre là-dedans comme dans un moulin et ça c'est juste pas possible. Pas plus tard qu'hier, il y a ENCORE un mec (un gars du voyage) qui est rentré dans le jardin avec sa voiture pour inciter mon beau-père à repeindre sa toiture... Non mais WTF.

Bref il y aura donc une haie tout autour du terrain et une nouvelle entrée. B. a creusé l'allée que voici (Alice qui mange son gâteau en bas à droite c'est cadeau ^^) :

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Devant cette allée B. va faire poser un portail ; il a donc sollicité mon avis sur le modèle à acheter. J'ai halluciné devant la multitude de modèles existants : ajourés, semi-ajourés, pleins, droits, arrondis, en forme de chapeau de gendarme inversé... Et encore je vous fais grâce des autres caractéristiques sinon mon article va devenir chiant comme la pluie. Mais bon bref je ne m'étais jamais rendue compte qu'il en existait autant.

Comme le concret est plus parlant qu'un catalogue, je suis allée me balader dans ma commune pour voir quels portails décoraient les maisons (je kiffe ma commune, vous l'ai-je déjà dit ? <3 ) (par contre je déteste les habitants).

J'ai écarté d'emblée les maisons du centre bourg, qui sont anciennes et possèdent de vieux portails à barreaux qui ne cachent rien et font à peine 1,20 m de hauteur ; je me suis plutôt aventurée vers les lotissements modernes. Je savais déjà que je n'aimais pas ce genre de quartier, mais alors là PUTAIN je vous jure qu'en passant là-dedans j'ai eu envie de me tirer une balle. Vous allez peut-être penser que je dis ça par jalousie parce que je n'ai pas les moyens de m'acheter une maison, mais je vous jure que ce n'est pas le cas. Autant je peux envier quelqu'un qui a une maison en pierres, mais alors CA, JAMAIS :

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Et encore j'ai trouvé pire ; maintenant ils construisent carrément ces choses qui ressemblent à des cubes. Non mais il y a des gens qui se sont endettés sur 25 ans pour vivre dans ce truc, sériously ?

 

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 Cadet Rousselle a trois maisons, lalala...

Ce genre de quartier sans âme ça sent la rue des Acacias (ou des Aulnes, des Chênes... très ironique de donner des noms d'arbres au royaume de Parpaingland), ça sent la "réussite" de façade, ça sent les gens dans la merde à la fin du mois, ça sent les disputes pour payer le crédit de la 3008 (oui car la grosse voiture est également un incontournable dans le package réussite hashtag concours de bites), ça sent les voisins que tu entends bouffer leur barbeuc et boire leur rosé comme s'ils étaient dans ton jardin tellement vos maisons sont collées les unes sur les autres, bref ça ne me fait VRAIMENT PAS rêver. Alors quand j'entends une copine d'Alice lui demander : "Mais pourquoi tu habites dans un appartement, vous n'avez pas trouvé de maison ?" ou encore une autre lui dire : "J'aime pas les appartements, c'est nul", j'ai envie de leur mettre une grosse claque dans leur gueule de fausses bourgeoises à crédit. Mais sérieusement, QUEL PARENT met des idées pareilles dans la tête de sa gamine de 5 ans ? Quand j'étais petite on habitait tous en appartement et les enfants n'avaient pas ce genre de préjugé... Cela me fait de la peine pour Alice ; j'espère vraiment qu'elle ne va pas perdre des copines à cause de la mentalité de merde de leurs darons (elles ne sont déjà que 7 filles dans sa classe :-S )...

L'autre jour j'ai lâché mon agacement sur Instagram :

 

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En revanche, les maisons en pierres rénovées j'adore. Là pour le coup je suis jalouse :-)

Bref je m'égare. Tout ça pour dire qu'en faisant mon petit "reportage" dans ma commune, je me suis rendue compte que dans les lotissements il n'y a généralement pas de portail devant les maisons ; juste une allée qui mène à l'entrée avec le garage à côté (cf. photo). Privet Drive quoi ^^ Beurk.

Bref pour conclure avec B. on s'est mis d'accord sur un portail plein et assez haut, parce que les gens qui regardent dans le jardin ça nous soûle. Pour vivre heureux vivons cachés.

31 octobre 2021

Xie xie

Samedi dernier j'étais à la gare de Rennes ; le hall était bondé (premier jour des vacances de la Toussaint oblige). J'étais dans la file d'attente de la boulangerie lorsque j'ai aperçu quelqu'un à quelques mètres devant moi. Quelqu'un que je n'avais pas vu depuis presque vingt ans : Martine, ma prof de chinois dont j'avais parlé dans cet article en 2018.

J'ai hésité une seconde avant d'aller la voir (elle était avec son mari et ses enfants), mais je me suis dit : "Tu ne la reverras probablement jamais, alors vas-y sinon tu le regretteras toute ta vie".

J'y suis allée. Quand je lui ai dit que je ne l'avais jamais oubliée, elle a posé ses mains sur mes avant-bras et les a étreints avec un sourire. J'ai fait pareil. Je ne sais pas si c'est ça le câlin version Covid ? (en même temps si elle m'avait prise dans ses bras cela aurait fait bizarre car je fais 30 centimètres de plus qu'elle). Nous avons échangé quelques mots ; elle m'a logiquement demandé ce que je devenais ; elle m'a dit qu'elle n'était plus professeur mais inspectrice (ce que je savais déjà), et qu'elle n'était pas encore à la retraite. J'ai également parlé à sa fille, que j'ai tutoyée sous le coup de l'émotion (bon en même temps elle était toute petite quand je l'ai connue). J'ai redit à Martine que je ne l'avais jamais oubliée (c'est bête mais seule cette phrase arrivait à sortir). Puis je lui ai dit que j'étais contente de l'avoir revue et je lui ai souhaité une bonne continuation, avant de reprendre ma place dans la file d'attente.

Cette rencontre imprévue a été une tempête émotionnelle : une fois mon sandwich acheté, j'ai remonté l'escalator pour aller dehors et j'ai fondu en larmes. J'aurais aimé lui dire tant de choses. Qu'elle est l'une des meilleures profs que j'ai jamais eu de ma vie. Que croiser sa route a été un privilège. Que j'admire sa force de caractère. Que très peu de personnes parlent un chinois aussi impeccable qu'elle. Qu'elle a été la seule à savoir comment me prendre durant cette période pourrie qu'était le lycée (souvenez-vous d'Olga...). Qu'à l'époque j'étais prisonnière d'un contexte familial épouvantable tout en étant une autiste non diagnostiquée ; qu'il ne faut donc pas m'en vouloir si j'ai été bizarre, froide, insolente ou que j'ai mal travaillé la matière qu'elle enseignait. Que je suis une survivante. Que j'ai essayé 250 fois de lui écrire une lettre pour lui dire merci mais que je n'ai jamais réussi. Et tant d'autres choses encore... Toutes ces choses étaient sous-entendues dans mon regard et dans mon : "Je ne vous ai jamais oubliée et je voulais juste que vous le sachiez", maisje ne sais pas si elle l'a compris.

Cela dit, je ne regrette pas de m'être cantonnée à ces quelques mots très banals : d'une part je me voyais mal lui raconter ma vie devant sa famille, et d'autre part si je l'avais fait je me serais effondrée. Or on ne s'effondre pas devant Martine. D'ailleurs je suis fière d'y être parvenue :p

Bref j'ai pleuré ma race sur l'esplanade de la gare ; les gens ont dû croire que mon mec venait de partir combattre dans un pays en guerre. Je me suis mouchée dans la serviette du sandwich. Je n'avais pas de trousse de maquillage sur moi donc je vous laisse deviner la tête de zombie que je me suis traîné toute la journée. Mais ce n'est pas grave je suis très heureuse d'avoir pu revoir Martine. Comme quoi la vie est vraiment bizarre parfois :-)

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 L'arrière de la gare de Rennes, qui fut mon pleuroir personnel le 23 octobre :p

 

 

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